Je me tenais près de la porte d’entrée. Je n’avais pas l’intention d’aller près du cercueil. Je ne voulais pas que la dernière image que j’aie de ma grand-mère soit celle de sa peau grisâtre et ses mains croisées sur son ventre. Je préférais me la rappeler en pleine forme, riant aux éclats en m’attrapant dans ses bras. Du coin de l’oeil, Je vis ma grande tante, la sœur de ma grand-mère se diriger à petits pas vers moi. Elle voudrait sans doute qu’on la regarde en partageant nos plus beaux souvenirs d’elle. Elle avait toujours été du genre nostalgique. Mais j’imagine que plus on vieillit, plus les souvenirs prennent de place. Je m’esquivai rapidement vers les toilettes. J’entrai pour me rafraîchir le visage et surtout, pour me cacher de la famille. Je ne supportais pas les enterrements. La salle de bain qui m’avait à prime abord paru déserte, fût bientôt prise de sanglots. Discrets, mais bien réels. JE baissai la tête pour vérifier qui pleurait ainsi mais il n’y avait aucune chaussure sous les portes. JE tendi l’oreille. Ça reniflait vers la droite. Je m’approchai d’une des cabines et appuyai l’oreille. Quelqu’un pleurait derrière la porte. Je cognai doucement. Les pleurs arrêtèrent un instant. Puis, ils recommencèrent.
-Ça va ?
-…
-Vous êtes correct ?
– Qu’est-ce que t’en pense?
-Vous êtes triste, bien sûr. Mais pourquoi l’être en cachette alors que tout le monde est ici pour l’être ensemble ?
-J’aime pas pleurer en public.
-Je peux rester avec vous ?
-…oui…si tu arrêtes de me vouvoyez.
-Comment vous… Comment tu t’appelles?
-Alice.
-Moi c’est Paty.
-Pour Patricia ?
-Non. Paty tout court.
-Paty, ça te dérange pas de parler à une porte ? Parce que je suis pas prête de sortir d’ici.
-Oh non. Je préfère parler à une porte, qu’à une morte.