La ville comme terrain de jeu. L’étendue de l’île à la merci de nos envies. De notre folie. Un immense sablier, retourné par hasard, par accident, comme on brise un verre au sol. Le compte à rebours est enclenché, les règles sont fixées. Des règles strictes, à n’enfreindre sous aucun prétexte.
Ni gagnante, ni perdante, et pourtant, nous ne jouons pas dans la même équipe. Chacune défend son camp. Se sauver de l’autre, envers et contre tout. Contre les rires, les mots chuchotés avant de s’endormir et sitôt oubliés. Contre ta main guidant la mienne dans les draps emmêlés.
Première manche, le printemps. En attendant que les jours se réchauffent, nous serons deux guerrières, de l’Armée du Salut. Dans des tranchées de textiles, il faudra dénicher la tenue adéquate pour continuer la partie. Ne pas prendre froid.
Je me méfie de toi. De l’avantage que tu prendras sur moi. Quand tu viendras me trouver, le sac rempli de pains sucrés. Lassée et affamée, je te laisserai l’emporter.
Revanche, l’été. Je te prendrai en duel. Tu n’auras que les bosquets pour te cacher de mes puissants tirs aquatiques. Je veux te voir sécher tes longs cheveux au soleil, comme marque de ta défaite. Misérable.
La belle, une dernière chance. Une dernière séance. Sur un écran de cinéma, convaincs-moi de tes émois. Entrer dans ta tête, il ne reste plus que ça. La collision fatale, s’arrêter un instant sur ce qui nous meut. Nos coups de cœur cinés auront-ils évolués ? Faire le point, le bilan. Comme au commencement.
Je suis prête, et si tu l’es aussi, je te laisse lancer les dés. D’avance, je sais que si je n’en sors pas blessée, je serais malgré tout changée. Mais je suis bien entraînée. J’ai comme arme ultime l’amour. Celui qu’une autre me porte, faute de lui porter en retour. Une épaisse cotte de mailles contre tous tes coups bas. Contre les coups du sort.
Choisis ton arme. C’est ton tour.